(C) Simon Duclos

Quel rôle jouent les médias sociaux au sein d’une période de pandémie?

Selon une récente étude menée par la chercheuse et neuroscientifique de l’Université Concordia, Najmeh Khalili-Mahani, 700 personnes interrogées ont déclaré que leur utilisation des réseaux sociaux ainsi que des plateformes de diffusion avait augmenté. 

L’étude détermine que le lien étroit entre le stress et la dépendance à l’écran était dû au fait que ces derniers offraient à certaines personnes un endroit où se réfugier contre le stress causé par la pandémie. 

Toutefois, cette réalité n’est pas la même pour tout le monde puisque pour certains, une trop grande utilisation des médias sociaux serait plutôt la cause de plusieurs troubles mentaux.

Plusieurs personnes ont rapporté une détérioration au niveau de leur santé mentale au Québec, mais aussi à l’étranger. Une seconde étude menée auprès de 1577 adultes et 214 professionnels de la santé à Wuhan, en Chine, rapporte que le fait de passer plus de deux heures par jour à regarder des nouvelles en lien avec la COVID-19 sur les médias sociaux est associé à une plus haute probabilité d’être diagnostiqué d’une dépression d’anxiété.

« Environ un tiers des répondants disaient passer plus de deux heures par jour sur les réseaux sociaux », peut-on lire sur le site.

(C) Fight The New Drug

Y a-t-il des changements de comportement liés à l’utilisation des réseaux sociaux?

D’après Guy Desrosiers, directeur de la campagne Pause ton écran, mise sur pied afin de sensibiliser les gens sur la surutilisation des écrans, le changement de comportement est très relatif à chacun, et dépend grandement de l’utilisation qu’en font les gens, mais aussi par rapport à l’attachement que chacun a vis-à-vis des réseaux sociaux. 

« Les gens finissent par laisser les médias sociaux prendre toute la place. Ça peut affecter la vie. Il y’a une peur d’être séparé de notre appareil. Les gens pensent constamment à où est leur appareil et s’il est à proximité. » Ils seraient alors touchés par la mobidépendance précise-t-il. (Entretien téléphonique, 5 octobre 2020).

En plus de changements de comportements personnels, des changements d’ordre plus général surviennent aussi. « Cela renforce le temps réel, la vélocité, la production de trace numérique, de donnée et intelligence artificielle. L’influence est beaucoup plus qu’individuel », note André Mondoux, professeur et responsable du Baccalauréat Médias numériques à l’UQAM. (Entretien téléphonique, 5 octobre 2020)

(C) Simon Duclos

Y aurait-il une hausse de l’utilisation des médias lors de la seconde vague ? 

D’après une enquête réalisée entre le 29 mars et le 3 avril 2020 par Statistique Canada, les trois quarts des Canadiens âgés de 15 à 49 ans passent plus de temps sur Internet comparativement au temps dédié avant la pandémie. 

En effet, 66 % d’entre eux consacrent plus de temps à regarder la télévision et 35 % d’entre eux passent plus de temps à jouer à des jeux vidéo. « Les médias sociaux ça a tendance à isoler et radicaliser, mais il y a d’autres dynamiquesqui entrent en jeu ce qui fait que les médias sociaux causent ce phénomène-là, mais sont aussi causés par ces phénomènes là », mentionne Mondoux. 

Cette tendance à l’isolation aurait déjà débuté avant la crise sanitaire, sans oublier que la première vague a atteint des sommets au chapitre du temps d’utilisation des médias sociaux. Les statistique de l’utilisation des médias sociaux ne risque pas de dépasser ceux de la première vague selon le professeur. « Je ne pense pas qu’il y aura une hausse durant cette seconde vague», conclut-il. 

(C) The Fight of Faith

Comment les médias sociaux affectent-ils notre cerveau?

Les médias sociaux sont des machines bien complexes, mais avec une mécanique bien précise. Les concepteurs de ceux-ci ne savent que trop bien, comment retenir l’utilisateur moyen sur leurs applications, une méthode efficace qui a de nombreux impacts sur notre cerveau, affirme Desrosiers.

« Les compagnies qui nous offrent ces services marchandent ces informations à des tiers, parfois ce sera à des organisations qui vont influencer nos choix de société. Ils sont tous en concurrence. Ils ont créé des outils pour nous garder actifs le plus longtemps possible d’où les signaux d’engagements (mentions j’aime, partage, etc.) ce n’est pas anodin […] Ce sont des mécanismes qui génèrent de la dopamine. […] Ça génère le fear of missing out (ou peur de manquer quelque chose en français), ça continue à nous attirer, il faut en être conscient de ça, c’est organisé par les compagnies vivant de notre attention. Les gens qui publient publient de belles choses, il y a un environnement de lunette rose qui n’est pas la réalité, ce n’est qu’un côté de l’information et c’est choisi par les algorithmes. »

(C) Healthline.com

Quel type de personne se trouve plus à risque?

En ce qui concerne la tranche d’âge des gens les plus affectés par la problématique, il semblerait que ceux n’ayant pas atteint mi-vingtaine, se retrouverait plus affectés par une mauvaise utilisation des médias sociaux.

« Le développement du cerveau se complète à l’âge de 25 ans au stade d’autocontrôle, ce n’est plus uniquement les stimulations de plaisir, on a des stimulateurs d’autocontrôles qui nous disent, oui c’est le fun le plaisir, mais là je dois faire autre chose. Il y aussi les gens qui manquent de confiance en soi qui vont se réaliser sur les réseaux sociaux et sur le jeu en ligne. Tout ça, c’est du temps qu’on emprunte sur autre chose et ça peut rendre ça malsain », affirme Desrosiers.

(C) Simon Duclos

Quel est le meilleur moyen de se préserver sans arrêter de s’informer?

Afin d’éviter une abondance de stress et d’anxiété de la sorte, il vaudrait mieux diversifier la provenance de l’information que nous lisons, c’est-à-dire s’informer ailleurs que sur les médias sociaux, explique Desrosiers. 

« Si on s’informe sur les médias sociaux, c’est de l’information à sens unique (…) On n’est pas vraiment informé. Il faut fouiller ses sources, des informations peuvent être commanditées, donc il faut valider ses sources d’informations. Pour se faire une bonne opinion, il faut connaître tous les côtés d’une médaille, favorable et défavorable. C’est comme ça qu’on se fait une opinion complète. »

À ce sujet, l’INSPQ recommande aux gens, durant cette pandémie de « favoriser les usages des écrans qui permettent d’être actifs physiquement », notamment les jeux vidéos actifs et les séances d’exercices visuelles, afin de garder son moral à flot.

Sources :

https://www.inspq.qc.ca/publications/3015-utilisation-ecrans-pistes-encadrement-covid19

https://www.jmir.org/2020/8/e20186/

https://www.concordia.ca/news/stories/2020/10/06/covid-19-stress-is-affecting-how-we-use-our-screens-new-study-finds.html https://mental.jmir.org/2020/5/e19009/

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